Genèse de l'anthologie




C'est à l’occasion de deux manifestations culturelles consacrées à l’Arménie à Die (Drôme) — le Festival Est-Ouest (octobre 2000) et le Salon du livre (mai 2001) — que nous avons, Stéphane Juranics (poète) et moi (journaliste dans la presse communautaire arménienne), rencontré Mariné Pétrossian et Violette Krikorian. Ces deux poétesses, dont nous connaissions déjà en partie le travail — notamment grâce aux traductions de Vahé Godel et Denis Donikian — y étaient invitées, en compagnie de Vahram Mardirossian et de Tigran Paskevitchian, autres chefs de file de la nouvelle génération poétique d’Arménie, à participer au cycle de lectures et de débats sur la littérature arménienne contemporaine.


Nous avons alors pu échanger de vive voix avec Mariné Pétrossian et Violette Krikorian sur l’effervescence de la vie poétique en Arménie post-soviétique.


Quelques mois plus tard, mue par le désir de faire découvrir à un plus large public l’existence de cette nouvelle génération d’auteurs, j'ai alors eu l’idée de réunir un certain nombre de ses représentants dans un ouvrage. Cette idée a aussitôt séduit Stéphane. C'est ainsi que nous avons pris, Stéphane Juranics et moi, la décision d’établir une anthologie bilingue de la poésie arménienne contemporaine réunissant des poètes nés au plus tôt à partir de 1945. Une anthologie qui pourrait donner pour la première fois aux lecteurs francophones un aperçu de la création poétique en langue arménienne depuis les vingt ou trente dernières années — c’est-à-dire dans la période allant de la fin de l’ère soviétique à nos jours.


A partir de décembre 2001, nous proposions ainsi à Mariné Pétrossian (née et vivant en Arménie), Violette Krikorian (née en Iran — où existe une importante communauté arménienne — et vivant depuis l’âge de 14 ans en Arménie), Vahram Mardirossian (né et vivant en Arménie), Tigran Paskevitchian (né et vivant en Arménie), Hovhannès Grigorian (né et vivant en Arménie) et Sonia Sanan (née et vivant au Liban, écrivant en arménien occidental, langue de la diaspora) de figurer dans cette anthologie. Nous demandions également à Mariné Pétrossian de nous indiquer d’autres poètes arméniens « de la jeune génération ».



Extrait d'un mail d'O. Alloyan et S. Juranics à M. Pétrossian en date du 5 décembre 2001





Pour effectuer une première traduction (mot à mot) des textes, nous avons contacté Nounée Abrahamian, traductrice du français vers l’arménien (également présente au Salon du livre de Die en 2001 en tant qu’interprète), tout en la prévenant que « nous nous réserverions le choix définitif des textes » ainsi que, pour Stéphane, « le droit de retravailler » cette première traduction.




Extrait d'un mail d'O. Alloyan et S. Juranics à N. Abrahamian en date du 29 mars 2002


Celle-ci nous répondait aussitôt favorablement, précisant qu’elle avait de toute façon besoin que quelqu'un « rédige », c'est-à-dire adapte, ses traductions. Elle nous proposait également, sans aucune condition, de nous suggérer les noms de quelques jeunes poètes supplémentaires.


Extrait d'un mail de N. Abrahamian à O. Alloyan et S. Juranics en date du 22 mars 2002


Extrait d'un mail de N. Abrahamian à O. Alloyan et S. Juranics en date du 29 mars 2002


Entre 2002 et 2005, Nounée Abrahamian réalisait ainsi une première traduction d'un large choix de textes de ces auteurs pressentis par nous et de plusieurs autres poètes (parmi lesquels nous en connaissions déjà certains) suggérés par Mariné Pétrossian ou, dans une moindre mesure, par elle-même. Durant la même période, Stéphane réalisait l'adaptation française de l'ensemble de ces textes.


[Il est à noter qu'à la fin de ce travail d'adaptation réalisé par Stéphane, Nounée Abrahamian proposera à celui-ci de travailler à un tout autre projet littéraire et d'adapter une première traduction qu'elle avait effectuée de plusieurs nouvelles de langue arménienne :


Extrait d'un mail de N. Abrahamian à S. Juranics en date du 30 avril 2005


Pour diverses raisons ce nouveau projet ne se réalisera pas, mais cette proposition de Nounée Abrahamian montre bien que celle-ci était pleinement satisfaite de l'adaptation poétique effectuée par Stéphane pour l'anthologie Avis de recherche.]


En mars 2005, nous avons sollicité Krikor Beledian, poète de langue arménienne et auteur d’essais en français, pour rédiger une préface à cet ouvrage, tout en lui précisant que l'ordre de succession des auteurs dans l'anthologie serait l'« ordre chronologique ».


Ce dernier nous a aussitôt répondu favorablement et nous a également proposé, sans aucune condition, de nous suggérer quelques auteurs supplémentaires, ajoutant : « Vous faites ce que vous voulez, c'est votre livre ». Peu de temps après, il nous proposait les textes de quelques poètes d’Arménie et de diaspora (dont lui-même), que nous connaissions déjà pour certains, tout en précisant : « Vous n'êtes pas obligés de les accepter » et en nous disant « de voir si vous les estimez dignes de l’ouvrage que vous projetez ».


Extrait de la lettre de K. Beledian accompagnant les textes


Une première traduction de ces textes a été assurée par lui-même, Alice Keghelian, Nadia Basmadjian et Marie Gostanian ; l’adaptation française sera, une nouvelle fois, réalisée par Stéphane.


A la fin de ce travail d'adaptation réalisé par Stéphane, Krikor Beledian écrira d'ailleurs à celui-ci : « Vos remarques permettent parfois d'avoir une traduction plus fidèle qu'auparavant ».


Extrait d'un mail de K. Beledian à S. Juranics en date du 31 août 2005


Dans la deuxième moitié du mois d’avril 2005, nous établissions, Stéphane et moi, le corpus définitif des auteurs et des textes : nous ne retenions au total que vingt poètes d’Arménie et de diaspora (les classant par ordre chronologique, donc) parmi l’ensemble de ceux initialement pressentis par nous-mêmes (nous avions en effet sollicité les textes d’autres auteurs que nous n’avons finalement pas retenus) ou suggérés par Mariné Pétrossian, Krikor Beledian et, dans une moindre mesure, Nounée Abrahamian, comme cela est mentionné à la page 8 de notre avant-propos :


« Le corpus de cette anthologie a été établi à partir des propositions préalables de Mariné Pétrossian, (...) de la traductrice Nounée Abrahamian (...) et de Krikor Beledian (...) » (en plus des auteurs que nous avons nous-mêmes directement contactés, cela va sans dire).


De même, nous décidions seuls, pour chaque auteur, du choix définitif et de l’ordre de succession des textes que nous avons retenus (nous possédions en effet pour chacun de ces vingt poètes plus de textes que ceux qui figurent dans l’ouvrage, sachant que la majorité de ces vingt poètes avaient eux-mêmes présélectionnés leurs textes, les textes des autres auteurs ayant été présélectionnés par Mariné Pétrossian, Krikor Beledian et, dans une moindre mesure, Nounée Abrahamian).


C'est à regret que nous avons dû ainsi écarter nombre d'auteurs et de textes qui ne nous semblaient pas devoir, au bout du compte, s'insérer dans l'anthologie. Mais l'exigence poétique et la nécessité d'une cohésion d'ensemble ont, sans autre considération, guidé nos choix, comme cela est également mentionné à la page 8 de notre avant-propos :


« Nous avons veillé, dans nos choix, à respecter la richesse des formes expressives en ne négligeant aucune des tentatives créatrices nouvelles ».


Je le précise : si Mariné Pétrossian, Krikor Beledian et, dans une moindre mesure, Nounée Abrahamian, nous ont effectivement conseillé en nous suggérant un certain nombre d’auteurs (en plus de ceux que nous avons nous-mêmes contactés) ou de textes (en plus de ceux que nous ont proposés les auteurs eux-mêmes) aucun des trois — ni, cela va sans dire, les Editions Parenthèses — n’ont eu leur mot à dire quant au corpus définitif des auteurs et des textes que nous avons établi seuls, Stéphane et moi, en tant que directeurs de cet ouvrage et qu'à ce titre nous assumons pleinement.


Concernant la traduction de l’ensemble des textes des auteurs que nous avons retenus : une première traduction de dix-neuf de ces vingt auteurs (Mariné Pétrossian ayant elle-même pré-traduit ses propres textes) a donc été effectuée par Nounée Abrahamian, Krikor Beledian, Alice Keghelian, Nadia Basmadjian et Marie Gostanian ; l’adaptation française des textes de ces vingt auteurs a été intégralement réalisée par Stéphane dont le travail a ainsi duré plus de quatre ans et nécessité la réécriture complète de nombreux poèmes ou passages prétraduits pour aboutir à la version publiée de ces poèmes (voir l’index des traducteurs aux pages 323-326 de l’anthologie).


Le 3 mai 2005, nous contactions les Editions Parenthèses pour leur soumettre le manuscrit presque finalisé.


Celles-ci nous répondaient aussitôt favorablement.


Dans un courrier en date du 16 août 2005, l'éditeur reconnaissait l'originalité et la qualité du travail d'adaptation réalisé par Stéphane en écrivant à celui-ci :


« Je dois dire que tu as fait un super boulot, et certains choix sont vraiment intéressants ».


En août 2005 les Editions Parenthèses présentaient un dossier de demande de subvention au Centre National du Livre qui leur attribuait, au vu du manuscrit que nous leur avions adressé, une aide à l'édition d'un montant de 4500 euros.


Dans un courrier en date du 15 août 2006, l'éditeur reconnaissait que les Editions Parenthèses n'étaient absolument pas intervenues dans la réalisation du corpus de l'anthologie :




(sachant que les « deux ou trois modifications » en question concernent deux poèmes que nous déciderons nous-mêmes d'ajouter à la fin 2005).


L'anthologie Avis de recherche paraissait en septembre 2006 sans aucun nom de directeurs — ni d'ailleurs de traducteurs — sur la couverture ! Avec en prime, en première page, une formule de remerciement à Marie Jouannic (membre du Centre Européen de Poésie d’Avignon) qui n’a absolument rien fait dans ce livre, n’a purement et simplement rien à voir avec notre projet, et que nous ne connaissions même pas !!! (Nous avions initialement prévu un remerciement à Mariné Pétrossian, Krikor Beledian et Nounée Abrahamian.)


Pourtant, dès avant la publication de l’anthologie nous avions bien sûr, Stéphane et moi, demandé à plusieurs reprises aux Editions Parenthèses (que ce soit à l’oral, au téléphone ou par mail) de nous mentionner comme directeurs de cet ouvrage.


Ainsi, le 4 août 2006, Stéphane adressait au gérant des Editions Parenthèses un mail dans lequel il lui demandait une nouvelle fois de lui établir un contrat de traduction, avec une clause mentionnant la réunion et la présentation des textes par nous deux. Dans ce mail, il demandait aussi à pouvoir relire les épreuves définitives et à pouvoir signer le Bon à tirer avant publication.


Or, en dépit de l’usage éditorial — et même du plus élémentaire respect qu’un éditeur se doit de montrer aux directeurs comme aux traducteurs d’une anthologie qu’il publie —, le gérant des Editions Parenthèses ne répondra jamais à ces demandes, ignorant donc totalement :


1) notre demande légitime de voir nos deux noms figurer, en qualité de directeurs de l’anthologie, séparément de celui des traducteurs en couverture et en page de titre.


2) la demande légitime de Stéphane de se voir établi un contrat de traduction pour l’adaptation française de tous les textes de cette anthologie.


Sauf preuve contraire, aucun des traducteurs de cette anthologie ne s'est d'ailleurs vu établi de contrat ni n'a reçu la moindre rétribution de la part des Editions Parenthèses.


Ainsi, dans un mail en date du 14 novembre 2006, Mariné Pétrossian nous confirmait l'absence de contrat pour Nounée Abrahamian :




De même, dans un mail en date du 8 novembre 2007, Alice Keghelian nous faisait part de son fort mécontentement de n'avoir reçu ni contrat ni rétribution de la part des Editions Parenthèses pour sa première traduction d'un certain nombre de poèmes de l'anthologie :




Voici d'ailleurs un extrait du mail adressé par Alice Keghelian au gérant des Editions Parenthèses le 19 septembre 2007 :




Concernant le choix des auteurs et des textes, l’usage éditorial veut que les personnes ayant conseillé les directeurs d’une anthologie en leur suggérant un certain nombre d’auteurs ou de textes (comme cela a été le cas pour Mariné Pétrossian, Krikor Beledian et, dans une moindre mesure, Nounée Abrahamian) ne soient jamais mentionnées comme des codirecteurs.


L’éditeur l’a d’ailleurs lui-même reconnu en ne mentionnant pas Mariné Pétrossian dans la formule à quatre noms en page de titre !


Car si le fait de nous avoir conseillés avait conféré à Mariné Pétrossian le rôle de codirectrice — rôle qu’elle n’a d’ailleurs jamais revendiqué — pourquoi l’éditeur ne l’a-t-il pas mentionnée dans cette formule en page de titre, alors que celle-ci nous avait pourtant suggéré autant d’auteurs et de textes que Krikor Beledian et Nounée Abrahamian réunis ?


C'est donc en mêlant les notions de choix et de traduction que les Editions Parenthèses se sont permis d'établir en page de titre — contre notre avis, cela va sans dire — une formule ambiguë à quatre noms masquant totalement qu'en réalité nous avons « dirigé » et « coordonné » cette anthologie, comme l'a pourtant reconnu en public le gérant des Editions Parenthèses le 6 octobre 2006 au CIPM à Marseille.


Ce n’est pas tout : juste avant la sortie de l’anthologie, le gérant des Editions Parenthèses s’est permis d’apporter plusieurs modifications à notre avant-propos, nous sommant littéralement dans un courrier en date du 15 août 2006 d’accepter ces modifications sous peine de voir notre avant-propos porter la signature... des Editions Parenthèses !


Extrait de la lettre des Editions Parenthèses à O. Alloyan et S. Juranics du 15 août 2006


Nous laissons aux lecteurs de ce blog le soin de qualifier ce genre d'attitude...


Enfin, comme je l'ai déjà dit, la promotion de cet ouvrage, très développée du fait de l’Année de l’Arménie en France, s’est quasiment faite... sans les codirecteurs, Stéphane et moi.


En effet, hormis la soirée de présentation de l’anthologie au CIPM le 6 octobre 2006 (à laquelle seul Stéphane était d'ailleurs invité), nous n’avons été invités à participer à aucune des manifestations suivantes :


— le 7 octobre 2006, à la Maison de la poésie de Nantes : lecture de textes et présentation de l’anthologie, avec Mariné Pétrossian et Krikor Beledian ;
— le 7 octobre 2006, à la librairie La Nerthe, à Toulon : lecture de textes et signature de l’anthologie, avec Violette Krikorian, Armen Chékoyan et Nounée Abrahamian ;
— le 9 octobre 2006, au Centre culturel Hamaskaine, à Paris : rencontre avec Violette Krikorian, Mariné Pétrossian, Armen Chékoyan, Nounée Abrahamian, et Krikor Beledian ;
— le 10 octobre 2006, au Centre National du Livre, à Paris : lecture de textes de l’anthologie, avec Mariné Pétrossian et Krikor Beledian ;
— le 11 octobre 2006, à Paris : enregistrement de l’émission « Poésie sur parole » (diffusée le 12 novembre 2006 sur France Culture) consacrée à l’anthologie, avec Mariné Pétrossian, Violette Krikorian, Armen Chékoyan, Nounée Abrahamian et Krikor Beledian ;
— le 23 octobre 2006, à Paris : enregistrement et diffusion sur France Culture de l’émission « Surpris par la nuit » consacrée en partie à l’anthologie, avec Krikor Beledian ;
— du 22 au 26 novembre 2006, au Salon du livre de Chaumont (consacré à l’Arménie) : lecture de textes de l’anthologie par Krikor Beledian ;
— le 16 décembre 2006, au Festival National du Livre Arménien, à Marseille : signature de l’anthologie par Krikor Beledian.


Les 9 et 13 novembre 2006, le producteur de l’émission « Poésie sur parole » nous confirmait dans deux mails adressés à Stéphane que les Editions Parenthèses n’avaient pas proposé notre présence (!) pour l’enregistrement de l’émission « Poésie sur parole » pourtant exclusivement consacrée à cette anthologie et diffusée sur France Culture le 12 novembre 2006 :






De même, ni les Editions Parenthèses ni Krikor Beledian n’ont eu la décence de nous prévenir de l’invitation d’Alain Veinstein ni de nous proposer de participer à l’émission « Surpris par la nuit » diffusée sur France Culture le 23 octobre 2006.


Pourquoi ?


Sans doute de peur que nous n’y révélions en direct notre rôle, passé sous silence, de directeurs de cette anthologie...


En effet, nous aurions pu expliquer dans ces émissions comment nous avons « dirigé » et « coordonné » cette anthologie — pour reprendre les termes de la déclaration publique du gérant des Editions Parenthèses du 6 octobre 2006 au CIPM à Marseille (voir la partie Introduction en page d'accueil).


Expliquer par exemple que, pour mener à bien ce projet, nous avons, Stéphane et moi, contacté les chefs de file de la nouvelle génération de poètes de langue arménienne, orienté la recherche d’autres auteurs, défini la tranche d’âge des auteurs retenus, prévu dès l'origine un ouvrage bilingue, trouvé des personnes pouvant effectuer une première traduction (notamment Nounée Abrahamian qui, pour reprendre l'expression du gérant des Editions Parenthèses lui-même, « a traduit l'essentiel de l'anthologie en première traduction »), trouvé un préfacier et un éditeur, effectué le choix définitif des auteurs et des textes, établi l’ordre chronologique de succession des auteurs ainsi que l’ordre de succession des textes de chaque auteur.


Expliquer en somme ce qui justifie que nous ayons, Stéphane et moi, signé l'avant-propos présentant l'ouvrage, comme le font tous ceux qui ont « dirigé » et « coordonné » une anthologie...



Olivia Alloyan


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